★ scars and souvenirs.Je ne savais pas cela faisait combien de temps que j’avais mis les pieds dans cette maison. Un mois ? Trois mois ? Je ne sentais plus vraiment la différence, vu comment je n’y avais pas été souvent ces dernières années. Dans ce cas, pourquoi étais-je perturbée à ce point à l’idée de revenir en ces lieux ? Parce que je savais que pour la première fois, j’allais m’y installer définitivement. J’allais rester à Philadelphie pour de bon, aller au lycée comme toute adolescente de quinze ans d’ici quelques mois. Jamais je n’avais connu ce que c’était, avoir une vie stable, avoir une maison dans laquelle rester à l’année longue. Pourtant, ça ne m’avait jamais gênée, je m’étais toujours adaptée aux nombreux voyages faits avec mon père, puisque faute de vouloir me confier à quelqu’un pendant des semaines, il m’emmenait partout, absolument partout. Au pire, ce ne serait qu’une question d’adaptation, une grosse adaptation, mais peut-être je pourrais m’y faire plus rapidement que je l’imaginais. Enfin, j’allais essayer, je n’avais pas le choix, de toute façon.
« Je vais aller déposer mes valises dans ma chambre. » fut ce que je dis à mon paternel avant de monter à l’étage, me rendant dans cette pièce que j’appelais « ma chambre » alors que je n’y passais que la moitié de mes nuits par année, tellement que je n’avais jamais fait attention à la peinture et à la décoration, à l’exception d’aujourd’hui. Pire encore, ce fut la première chose qui me frappa, puisque dès que je vis la chambre pulluler le rose et le violet, je ne pus m’empêcher d’hurler :
« PAPA ! » d’un ton un peu colérique, histoire qu’il comprenne que ce n’était pas quelque chose de grave et qu’il n’avait pas à courir et risquer de se blesser. Par contre, cela ne voulait pas dire que j’étais en rogne contre lui. Jamais je ne pourrais l’être; mon père, c’était la seule famille que j’avais. Même à quinze ans, jamais je ne pourrais faire quoi que ce soit pour altérer ma relation avec lui. Il était tout pour moi. Le seul homme de ma vie – parce que sortir avec un joueur de rugby, aussi jeune soit-il, avec un père dans les pattes et plutôt costaud, c’est difficile – c’était lui, tout simplement, comme j’étais pour lui sa seule famille et c’était ainsi depuis que ma mère était partie, sans même me connaître, sans même tenter de le faire. Elle n’existait plus à nos yeux et ce, depuis longtemps. Quelques secondes après, mon père monta les escaliers, me demandant aussitôt
« Que se passe-t-il, ma chérie ? » « Pitié, dis-moi qu’on va refaire ma chambre, cette fois-ci… » Il fronça les sourcils devant mon air suppliant, mais quand il vit la pièce, il pouffa se rire, et n’hésita pas une seconde à dire :
« Évidemment ! T’en fais pas, je ne te laisserai pas comme ça… Ce sera même ma priorité numéro un ! » À ces mots, je ne pus m’empêcher de lui sourire, amusée. Combien de fois m’avait-il parlé qu’à quel point il était désireux de finalement faire comme tout homme de famille, des travaux manuels !? Eh bien, je venais de lui donner sa première mission. J’espérais simplement qu’il allait s’y prendre de la bonne façon, même si au fond, dans l’immédiat, ce n’était pas là ma principale préoccupation, préférant de loin me laisser aller dans les bras de mon papa qui tirait avantage de la situation pour faire un gros nounours de lui-même, m’embrasser sur le front, et me dire :
« Désormais, TU es ma priorité numéro un… », me faisant comprendre que finalement, tant que je serais avec lui, cette adaptation, cette nouvelle vie, ne pourrait pas être si difficile que ça. Ce n’était qu’un nouveau chapitre rempli de nouveautés qui ne pouvaient pas faire de mal, surtout pas à mon père, qui avait bien besoin de cette retraite et de savoir ce que c’était, avoir une vie normale.
----------C’était finalement le grand soir, celui que tous les lycéens attendent à la fin de leur parcours scolaire; le bal de promotion. Le moment était presqu’arrivé, tout était prêt, ou du moins, c’était ce que je pouvais comprendre, compte tenu du fait qu’Adrienne, Malika et Autumn ne m’envoyaient plus de message en panique pour s’assurer que tout était parfait. Pourquoi c’était à moi qu’elles envoyaient tout cela ? Tout simplement parce que c’était moi qui les avait aidées à trouver leur robe, leur cavalier, préparé leur petite fête d’avant-bal avec leur famille et tout ce qui venait avec. Je ne saurais pas expliquer le pourquoi du comment c’était arrivé, mais quoiqu’il en soit, elles semblaient heureuses, et pour moi, c’était tant mieux. Maintenant, il fallait que je me prépare moi-même, et j’avais une heure pour le faire. Heureusement, j’avais bouclé mes cheveux au préalable, faisant en sorte qu’il ne me restait plus qu’à les ramener en chignon avant de me maquiller, puis enfiler ma robe toute simple que j’avais acheté la semaine dernière, faute d’avoir eu le temps, puisque j’étais trop occupée à préparer les détails des soirées respectives de mes amies. Étrangement, cela ne me gênait pas. Si elles étaient heures, alors j’aurais fait mon boulot. De toute façon, ce n’était pas comme si je m’attendais à la soirée du siècle; je n’avais pas de cavalier, j’avais pris une tenue à la dernière minute, et franchement, cela ne me gênait pas plus que ça. Enfin, je fis quand même un effort pour être présentable, ou du moins, suffisamment pour que mon paternel, qui allait me déposer au bal, soit bouche-bée quelques secondes lors que j’allai le retrouver au rez-de-chaussée. Ça, ça signifiait que j’étais présentable, et c’était tout ce qui comptait. Je lui offris alors mon plus beau sourire, tandis qu’il sortit une petite boîte de derrière son dos, me disant :
« À défaut de pouvoir être ton cavalier, je me suis dit que je te ferais une petite surprise quand même… » Je baissai alors le regard, voyant un corsage se portant au poignet de la même couleur que ma robe. Émue, je le pris dans mes bras, l’embrassant sur la joue en lui disant avec sincérité :
« Merci papa… » Je le laissai me l’enfiler, sachant que cela lui faisait plaisir, puis sans attendre, nous nous rendîmes dans son véhicule, direction le bal de promo. Il me déposa à la porte, me souhaita une bonne soirée, puis sitôt que je fus sortie, je me dirigeai vers l’entrée, attendant tout de même quelque peu à l’extérieur, histoire de voir si j’avais raté l’arrivée de mes amies ou pas encore. Quelques secondes après, une voiture s’arrêta exactement là où mon père se trouvait précédemment, puis trois garçons en descendirent, laissant le chauffeur par lui-même. En regardant par curiosité, je m’attendais à voir un autre de mes camarades de classe, mais à ma surprise, je vis un jeune homme, peut-être un an plus vieux, visiblement embêté de tout cela. Sans vraiment comprendre pourquoi, je m’approchai, me penchai juste avant qu’il parte se garer, et je lui demandai :
« Pas invité ? » Aux premiers abords, le jeune homme paraissait surpris que je lui parle, mais il finit par me répondre :
« Non, je ne suis que le chauffeur… » Je lui servis un sourire triste qui, visiblement, le poussa à parler davantage, et me confier :
« J’arrive de Norvège, j’ai pas eu de bal de promo, du coup, je suis un peu… Jaloux ? » Il rit nerveusement à son dernier propos, tandis que pour ma part, je ne faisais que sourire, réfléchissant à toute vitesse. Puis, à la fin, je ne vis pas ce que j’avais à perdre à lui demander
« Eh bien… Pourquoi ne serais-tu pas mon cavalier ? » Pourquoi pas, après tout ? Je n’en avais pas, il aurait visiblement voulu connaître ce que c’était, un bal de promo… Nous étions tous deux gagnants dans la situation.
« Eh bien, il faudrait peut-être que je sache ton nom… » Je le regardai, amusée. Il avait un certain sens de l’humour, c’était presque mignon. Ne m’arrêtant pas à ce mini obstacle, je lui dis :
« Lexie. » et finalement, le tout se scella quand il me dit
« Caleb, enchanté » et partit garer son véhicule pour finalement revenir me trouver, histoire qu’on passe la soirée ensemble, sans que ni l’un ni l’autre ayons idée que ce serait la première soirée de nombreuses ensemble. Le hasard fait bien les choses parfois, et dans ce cas là, j’étais plus que gagnante, c’était certain.
----------Pour la première fois en trois ans, Caleb serait présent pour son anniversaire. C'était important, et surtout exceptionnel, alors nous avions l'intention d'en profiter. Pourtant, nous n’avions pas décidé de célébrer le tout en grandes pompes. Un dîner en amoureux, les cadeaux, le gâteau, et ce serait parfait. Et sincèrement, je ne pourrais pas m’en plaindre; il n’était pas question que je donne à Caleb son cadeau avec plein de gens autour, surtout que je ne savais pas si je pouvais considérer cela comme un cadeau, pour tout dire. Cependant, puisque c’était la seule façon que j’avais trouvé pour lui dire, je ferais ainsi. Je n’avais pas pu lui annoncer dans une lettre ou par téléphone, et il avait été particulièrement occupé ces derniers jours avec ce retour, sauf ce soir, où nous serions seuls, lui et moi. Bien que j’étais plus que ravie de le voir, il fallut quand même, pendant le dîner, que je m’efforce de ne pas me montrer nerveuse ou quelque chose du genre, même si en fait, c’était le cas. Puis, je me montrai plus stressée que jamais lorsque nous allâmes nous poser au salon, sur le sol, près du foyer, avec une tonne de coussins.
« Alors, on commence ? » La question n’aurait pas plus être plus appropriée. En fait, j’étais persuadée que s’il ne m’avait pas laissé lui donner son cadeau en premier, je me serais imposée. Je n’en pouvais plus d’attendre. Ça faisait plus de trois semaines que j’attendais ce moment. Sans me faire prier, je me redressai, puis je pris la petite boîte que j’avais emballée qui ne pesait pas grand-chose. Les lèvres pincées, je la lui donnai, le regardant ensuite l’ouvrir, le cœur battant la chamade. Comme je m’y en attendais, lorsqu’il ouvrit la boîte contenant le test de grossesse que j’avais passé au début du mois, il fronça les sourcils, visiblement confus. Ne sachant que dire, je laissai un court silence s’installer, puis lorsque je croisai son regard et que je l’entendis dire
« Lexie, est-ce que… ? », je ne pus m’empêcher de déblatérer, à la vitesse de l’éclair :
« Il n’est pas pour toi hein ! De toute façon, il est usagé parce que… » À peine eussè-je trouvé les mots pour lui annoncer que ce fameux test était positif qu’il me sautait dessus et m’embrassait avec autant d’amour qu’il pouvait en mettre. Confuse à mon tour dans un premier temps – et surtout surprise, en fait – je répondis malgré tout à son baiser, le regardant dans les yeux par la suite en demeurant impassible tandis que pour sa part, il me disait, la voix enrouée, les larmes aux yeux :
« Lexie ! Je suis si heureux ! » Lorsqu’il me serra contre lui de bonheur, je fermai les yeux, finalement soulagée. En effet, le fait d’être enceinte me faisait extrêmement peur. Depuis toujours, j’étais persuadée que je ne saurais jamais être une bonne mère, à défaut d’avoir eu un modèle pour l’être, et surtout, ne voulant certainement pas être comme cette mère que je n’avais jamais connue. Cependant, en voyant comment Caleb était heureux, autant qu’un gamin qui reçoit le plus beau cadeau d'anniversaire, ce qui le rendait encore plus mignon tandis qu’il disait, prêt à sautiller partout
« Je vais être papa ! Je vais être papa ! », je me disais que j’étais prête à faire cela, à fonder une famille avec lui. Pourquoi ? Parce que je l’aimais, parce que je voulais le rendre heureux, et apparemment, rien n’aurait pu lui faire plus plaisir que cette nouvelle. Éclatant de rire au moment où il me dit
« Tu n’aurais pas pu me faire un plus beau cadeau que ça… », ce fut à moi d’avoir les larmes aux yeux, mais cela ne dura pas longtemps, puisque bien rapidement, je grimaçai, me levant et disant seulement
« Maintenant tu vas m’excuser, trop d’émotions, nausées, faut que j’y aille ! » avant de détaler tel un lapin vers la salle de bains, tandis que j’entendais mon petit-ami rire doucement. Cela ne me vexa pas. À ce point, plus rien ne comptait, sauf le fait que je ne serais pas seul, et que je venais probablement de faire passer le plus beau des Noëls à mon homme, ou du moins, le plus beau avant que nous passions ce premier avec notre enfant et ce, dès la fin de l'année. Cela me semblait être dans une éternité, mais je savais que le temps passait vite, mais je ne craignais plus tout cela. Je ne craignais plus rien, j’étais tout simplement soulagée et heureuse, Caleb était aux anges. Rien d’autre ne comptait à ce moment précis.
---------- « Tu seras parti jusqu’à quand cette fois-ci déjà ? » « Fin décembre… » Caleb savait que je connaissais déjà la réponse, mais il avait eu l’amabilité de me répondre quand même. Plus encore, il ne réagit pas quand je soupirai discrètement, se doutant bien que cette idée ne me plaisait pas, comme à lui non plus, d’ailleurs. Histoire de tenter de rattraper le coup, bien que ce ne soit pas sa faute, il ajouta :
« Mais… Je vais essayer de m’arranger pour rentrer une semaine ou deux avant, et je serai avec toi et le bébé pendant un an après… » Honteuse, je baissai le regard, m’en voulant de ne pas pouvoir complètement être satisfaite de cette réponse. Normalement, je ne râlais pas quand il partait, sachant quel était son métier, étant déjà consciente du mode de vie que nous aurions si je sortais avec lui. Jusqu’à aujourd’hui, je l’avais accepté, mais là, tout avait changé. Je ne serais plus la seule à l’attendre à la maison, et pire encore, qu’importe s’il rentrait d’avance ou pas, une chose était certaine, c’était qu’il ne serait pas là pour la naissance du bébé. Je savais que ça ne lui plaisait pas, mais ça me plaisait encore moins, puisque si j’avais accepté le fait d’être maman, c’était pour lui, parce que ça lui faisait plus que plaisir. Comment pourrais-je oublier comment il avait réagi à Noël lorsque je lui avais appris la nouvelle ? C’était si magique, si inoubliable… Et puis, c’était sans parler de comment il se comportait actuellement; juste là, alors que nous étions tous deux, allongés dans ce lit que nous allions partager pour la dernière fois avant des mois, il avait la tête posée sur mon ventre qui commençait tout juste à s’arrondir, comme s’il guettait le moindre mouvement du bébé qui avait remué quelques fois ces derniers jours. Et il n’aurait certainement pas fini de remuer, mais malheureusement, Caleb ne pourrait pas le sentir, alors autant le laisser en profiter le temps qu’il le pouvait, puisque la prochaine fois qu’il sentirait ce bébé bouger, ce serait lorsqu’il serait dans ses bras.
« Ça va me manquer, de le sentir bouger comme ça… » Amusée, je souris doucement, puis je lui dis :
« Tu es sûr que c’est un garçon, hein ? » « Non, mais garçon ou fille, j’en ferai un petit dur à cuire, c’est certain. » « Caleb ! » Tout en riant, il posa un baiser sur mon ventre, puis il releva le regard avant de dire :
« Que ce soit un garçon ou une fille, je serai heureux, et c’est tout ce qui compte… » Il marqua une pause, puis ajouta :
« On garde la surprise, n’est-ce pas ? » Après avoir acquiescé d’un signe de tête, ce fut à moi de prendre la parole, et lui dire, d’une voix enrouée :
« Mais pour ça il faut que tu reviennes… » « Je reviendrai, je te le promets… » « Il le faut Caleb, je ne pourrai jamais faire ça toute seule, tu le sais… » Ne me laissant pas le temps de laisser mon idée, il se redressa, plongea son regard dans le mien, et il dit :
« Non seulement je te promets que je reviendrai, mais en plus, je te promets qu’on sera une famille à mon retour… Tu seras ma femme, et on aura notre enfant… » « Attends… ta femme ? » Cette fois-ci, il n’eut pas la répartie facile. Il prit une pause, et il ajouta, d’un air on ne peut plus sérieux :
« Ça fait un moment que j’y pense Lexie… Je t’aime… Je veux passer ma vie avec toi… » « Tu… Es-tu en train de me demander en mariage… ? » « Si tu veux, je pourrais me lever et mettre un genou en terre, mais… Oui, tu peux considérer ça ainsi… Je te demande en mariage… Lexie Atkins… Voudrais-tu m’épouser ? » Des larmes vinrent brouiller mon regard un instant, puis sans dire quoi que ce soit, je passai une main autour de sa nuque, approchant son visage du mien pour y déposer un baiser passionné. À la fin de celui-ci, ce fut mon petit-ami, maintenant fiancé, qui brisa le silence en lâchant :
« Dois-je comprendre que c’est un oui ? » Je lui répondis dans un hochement de tête puis un large sourire, puis cette fois-ci, ce fut lui qui vint chercher un nouveau baiser sur mes lèvres, baiser pendant lequel je lui dis :
« Je t’aime Caleb… », et ce fut les derniers mots que je prononçai avant de me laisser aller dans ses bras pour une dernière nuit d’amour avant son départ, maintenant remplie d’espoir qu’il allait être de retour plus vite que je ne le croyais, que nous pourrions être réellement une famille, comme il me l’avait promis. Il allait tenir sa promesse, je le sentais, je le savais, et personne n’aurait pu me contredire.
---------- « Tiens, ma chérie… » D’un petit sourire, je le regardai déposer une assiette avec deux cupcakes et un verre de lait devant moi, sur la table, comme il avait l’habitude de le faire quand j’étais petite. Il savait que ça me faisait du bien normalement, même si en ce moment, je n’avais pas faim. Histoire de lui faire plaisir, je lui dis quand même
« Merci papa… », puis je pris une gorgée du verre de lait sans toucher aux petits gâteaux pour le moment, le regardant plutôt s’installer dans le fauteuil, non loin de moi, histoire de contempler la vue incroyable qu’il avait de sa terrasse. Franchement, il avait fait le meilleur des choix en achetant cette maison en Floride. Il pouvait y passer des journées agréables, et cela me permettait aussi de venir passer du temps en sa compagnie pendant les vacances, même si en ce moment, ce n’était pas les vacances. Toutefois, j’avais compris, au bout de deux semaines après le décès de Caleb, que je ne pourrais pas rester enfermée dans mon appartement et mon travail bien longtemps. C’était là que mon paternel m’avait proposé de venir passer du temps chez lui, ce que je n’avais pu qu’accepter, même s’il n’en demeurait pas moins que cela demeurait difficile de me changer les idées, passer à autre chose. Et ça, mon père le comprenait, d’où le fait qu’il ne fut pas surprenant de l’entendre dire :
« Tu sais, Lexie, si tu veux… », ce à quoi je répondis, sans même le laisser finir sa phrase :
« Je sais, mais je ne veux pas en parler… », pinçant les lèvres afin de reprendre de la contenance, puis brusquement changer le sujet et lui demander :
« Comment ça va avec Michelle ? » Malgré les circonstances, je crus voir son regard s’illuminer, et cela me fit sourire. C’était si adorable de le voir ainsi, amoureux de cette femme qui avait finalement pu le rendre heureux. C’était d’ailleurs pour cela qu’il était venu ici, et franchement, jamais je n’aurais pu l’empêcher, vu comment il se portait bien depuis qu’ils étaient ensemble.
« Tout va très bien… Tellement qu’en fait… » « En fait quoi ? » Comme un gamin, il baissa la tête, sourit de façon un peu idiote, et répondit :
« Eh bien, j’aurais envie de la demander en mariage… » Cette fois-ci, ce fut mon regard qui s’illumina, puis je lui répondis, sans hésitation :
« Mais c’est génial ! Tu comptes lui faire ta demande quand ? » « Je ne sais pas… Je ne me vois pas lui demander maintenant, tu sais avec… » « Non ! Tu n’as pas à attendre à cause de moi ! » « Mais tu sais, avec le bébé… » Les larmes commençant à me montrer aux yeux, puisque je commençais à me sentir énervée pour le coup – et les hormones n’aidaient clairement pas – j’insistai en affirmant :
« Non ! Tu l’aimes, demande-lui ! N’attends pas, il ne faut pas attendre ! S’il te plait, n’attends pas ! » « Pourquoi es-tu si pressée tout à coup, Lexie ? » Ce fut la question de trop. Sans réfléchir, les larmes coulant sur les joues, je dis d’une voix complètement brisée :
« Parce que ça ne sert à rien d’attendre pour être heureux, on ne sait jamais ce qui va arriver… » « Oh ma chérie… » Sans attendre plus longtemps, il se décala, me prit dans ses bras, et moi, je ne sus me retenir; j’éclatai en sanglots amers, m’accrochant au t-shirt de mon paternel avec désespoir, pleurant, criant ma douleur de l’avoir perdu comme je m’étais retenue de le faire depuis que j’avais appris que Caleb ne rentrerait jamais. Il n’avait pas tenu sa promesse. Il n’était pas revenu. Nous n’allions pas nous marier, jamais il ne verrait son enfant voir le jour, jamais il ne lui apprendrait à être un « dur à cuire ». J’étais seule. J’étais perdue. J’étais complètement démunie.
« Je ne peux pas papa… Je ne peux pas faire ça toute seule… Je ne peux pas être mère… » « Mon ange… » « Je… J’étais contente parce que Caleb l’était… Je me suis laissée convaincre que nous pourrions être une famille… Il était si content d’être papa… » Je commençai à pleurer de plus belle, et mon père me serra encore plus fort contre lui, sans rien dire, exactement comme j’en avais besoin en ce moment.
« Je ne peux pas, je ne peux pas… Je suis si désolée papa… » Après avoir déposé un baiser dans mes cheveux, il me dit à voix basse :
« Écoute ma chérie… Quoiqu’il arrive… Tu pourras compter sur moi, d’accord ? Tu ne seras jamais seule… » Un nouveau flot de larmes s’échappa de mes yeux, mais malgré tout, je me calmai quelque peu, fermant les yeux pour profiter du contact du seul homme qui me restait réellement dans ma vie. Je passai même mon bras autour de lui pour lui faire savoir, même si je n’étais pas capable de lui dire, que j’étais reconnaissante de se montrer si compréhensif, et que peut-être je n’étais pas destinée à être une épave éternellement, même si je ne savais toujours pas ce que je ferais, comment j’allais me relever de ce qui semblait être le pire cauchemar de toute ma vie. Au moins, il y aurait mon père, comme toujours. Actuellement, c’était énorme comme idée à avoir, même si ce ne serait jamais assez pour cicatriser cette blessure béante qui s’était ouverte dans mon cœur, et qui ne se refermerait probablement jamais.