Tanzie ft. William
Say something.
Le jeune William soupira une nouvelle fois, promenant son regard sur l'entrée. Toujours personne. Depuis combien de temps attendait-il ici au fait ? Cinq, dix, quinze.. Vingt minutes peut-être non ? Peut-être plus, qui sait ? Il ne savait plus, cela faisait bien longtemps que la notion du temps lui était inconnu. Que faisait-elle d'ailleurs ? Il détestait attendre. Peut-être était-ce là un de ses rares traits de fils de famille aisée. Sans doute. Ou peut-être pas. D'ailleurs, il fallait dire que ce n'était pas dans les habitudes de la jeune femme d'être en retard. Elle avait toujours été presque jamais en retard. Il n'en avait du moins pas le souvenir. N'y tenant plus une seule seconde, il fouilla alors dans la poche de sa veste pour en ressortir son portable. Machinalement presque, il composa ce numéro qu'il connaissait à présent par coeur. Ah la vie maritale, remplie de bonnes vieilles habitudes ! Une première sonnerie retentit à l'autre bout du fil. William patientait encore. Une seconde fit son apparition tandis qu'il commençait à réellement faire percevoir des signes extérieurs, comme sur son visage, d'inquiétude.
« Allez, Eileen, décroche s'il te plait... » murmura-t-il presque tout en laissant ses yeux vagabonder dans le hall du musée. Ce n'est qu'à la fin de la troisième sonnerie qu'il entendit enfin la jeune femme décrocher. Il enchaina de suite.
« Tu n'as pas oublié notre rendez-vous j'espère ? » Il entendit alors comme un bruit de fond, des papiers sans doute, tandis que la blonde répondait d'un ton presque paniqué.
« William ! Je.. Je suis désolée, j'allais justement t'appeler... Je devrais quitter un peu plus tard du cours. Un parent d'élève veut me rencontrer pour quelques renseignements. » Le jeune homme l'écouta, il sentait un ton réellement ennuyée de la part de sa femme. Un sourire se dessina sur ses lèvres.
« Ne t'inquiètes pas, si c'est pour ton cours de danse alors ... Tu penses quitter tôt ...? » Un petit silence se fit entendre.
« Hm.. Je ne sais pas réellement. Tout dépend. Mais ne m'attends pas plutôt. Je sais que tu voulais qu'on aille se faire une petite balade rien que nous deux. Je sais comme tu adores le musée de Withby. Je suis vraiment désolée... » Ses yeux se ramèrent sur ses pieds.
« Ce n'est rien, Eileen. » répéta-t-il alors.
« Je vais plutôt rentrer, on pourra se refaire cette petite après midi ensemble un autre jour. Ce n'est pas réellement drôle sans toi. A vrai dire, les oeuvres d'art ne me semblent beaucoup moins intéressantes.. » lui confia-t-il alors, un air totalement malicieux sur le visage que sa femme ne put bien évidemment pas voir mais qu'elle devina sans aucun doute possible.
« Ah oui ? Et bien sache que... » A vrai dire, il n'eut pas le loisir d'entendre d'avantage. Pas qu'il s'était réellement désintéressé de la conversation, non bien sûr que non, mais tout simplement parce qu'il avait senti quelque chose dans son dos. Ou plutôt dans sa poche arrière droite. Instinctivement, il mit sa main à son pantalon. Rien. Son portefeuille, où était-il bon sang ?!
« Eileen, je... Je te rappelle tout à l'heure, je dois.. Régler quelque chose. » prononça-t-il alors ne faisant pas attention réellement.
« Will, tout va bien ? Tu sembles... » Il coupa la conversation en appuyant sur le téléphone rouge. Il n'avait pas le temps pour ça. Bien évidemment en quelques secondes, il avait pu aisément voir que le voleur de ce dit portefeuille n'était autre qu'un gamin de primaire, ou de collège. Il n'y fit pas réellement attention à vrai dire. Il préféra lui courir après plutôt que d'y réfléchir. Ainsi, en quelques minutes, il réussit à lui attraper le col et à l'arrêter. Ce ne fut pas une mince affaire à vrai dire. C'est que ça court vite ces petites choses-là. Ainsi, il tendit alors la main.
« Mon portefeuille. » lui dit-il simplement. Oh, il n'allait pas le blâmer ou du moins faire un scandale. Il n'était pas comme ça. Après tout, le gamin semblait bien plus perdu qu'autre chose. Où était ses parents d'ailleurs ? Ne devait-il pas être à l'école à cette heure de l'après midi ? Encore un enfant livré à lui-même... Non, William n'avait pas du tout en tête que des classes pouvaient se rendre dans un musée. Non pas du tout. Il observait le gamin, attendant que ce dernier lui rende son dû. Enfin c'était sans compter sur la détermination de ce dernier.
« Je l'ai pas vot' portefeuille, monsieur. J'ai rien volé moi. » s'entêta-t-il, un regard de défi dans le regard. Un brin trop défiant d'ailleurs selon William.
« Ne joue pas ce jeu-là avec moi. Rends moi ce portefeuille et je te laisse t'en aller d'accord ? » Le gamin sembla peser le pour et le contre. Ou alors tentait-il de trouver une issue favorable pour lui.
« Mademoiselle ! Mademoiselle ! Ce monsieur m'a attrapé et ne veut plus me lâcher.. ! » hurla-t-il alors à une tierce personne qui se trouvait derrière lui.
« Qu'est-ce que... ?! » William n'eut pas le temps de finir sa phrase que le gamin se détachait de son emprise et se réfugiait derrière une personne. Une jeune femme pour être exacte. Les enfants étaient réellement des tares certaines fois, il se félicitait presque de ne pas en avoir. Du moins de ne pas en avoir de cette éducation-ci. Quand le blond se retourna, prêt à s'expliquer avec cette dite jeune femme, ses mots restèrent comme bloqués dans sa gorge. Oh, il aurait aimé pouvoir sortir une phrase pour se défendre, récupérer son portefeuille et partir loin d'ici pour retrouver sa femme. Oui, il aurait tellement voulu. Pourtant, un simple regard changea tout et le paralysa presque, du moins dans sa tête, ne laissant rien transparaître en dehors comme on le lui avait appris depuis sa naissance. Il avait l'impression de revenir six ans en arrière. De redevenir ce jeune adulte de vingt ans, oui il avait l'impression que les années s'étaient envolés. Elle était là devant lui, n'ayant presque pas changé. Il aurait reconnu son visage entre mille, ses lèvres si fines n'avaient plus de secret pour lui, ses yeux marrons étaient comme ancrés dans sa mémoire et enfin ses boucles brunes flottaient toujours dans son esprit. Non, elle n'avait pas changé pour lui. Les quelques secondes qui se passèrent lors de sa découverte semblèrent presque se figer pour paraître des heures. Il en oublia presque cette histoire idiote de portefeuille. Elle était là devant lui.
Tanzie. Et pourtant, une tristesse et une incommensurable colère commencèrent doucement mais surement à remonter à la surface. Ces sentiments de rancoeur bien que vieux de six longues années étaient toujours aussi vifs, aussi surprenant que cela pouvait être.
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