let's get crazy. (mara)

C'est bientôt l'hiver. Le retour du froid qui gèle les os sans qu'on puisse y faire quelque chose. Mara, elle ne travaille pas dans un bureau. Elle, c'est sur le terrain, l'endroit où on met les pieds dans la boue et le nez dehors pour qu'il rougisse comme un thermomètre. Mara a rendez-vous avec Kay. Elles doivent faire du shopping. Qui a demandé ? Kay, bien sûr. Mara et le shopping, c'est une équation vouée à l'échec. Marabeth Greenhill a toujours eu un seuil de tolérance très bas lorsqu'il s'agissait de faire du shopping. Madame Greenhill devait l'y traîner de force, ce qui entraînait bien souvent les moqueries de Maxim. Mais lui aussi finissait par être forcé de se joindre à la corvée shopping. Fallait pas rire baby. Mara quitte la maison sans se soucier de Gavin. Ces temps-ci, elle fait preuve d'un égoïsme à tout terrain et ça lui en ferait presque peur. Ça, c'est pas elle. Mara est embourbée dans un tourbillon émotionnel depuis Dane. Il est revenu, il a tout chamboulé, comme toujours. Il s'est réveillé il n'y a pas si longtemps. Elle a réalisé que ce réveil, c'était la seule chose qui la maintenait en vie. Et Gavin dans tout ça ? Et leur mariage ? Aux oubliettes ? Peut-être. La flamme semble s'éteindre jour après jour. Mara déteste lui faire du mal, le voir comme ça. C'est insupportable et pourtant, s'échapper reste indispensable. Elle rejoint Kay, toujours parfaitement vêtue. Cette fille, elle a un dressing qui fait dix kilomètres. Elles commencent par faire les magasins du haut. C'est toujours plus simple de descendre avec des paquets que de monter avec. Kay s'arrête partout. Faut dire qu'elle pourrait rendre un sac poubelle portable. Mara se contente de regarder passivement. Elle cherche un peu, farfouille doucement entre les pulls mais rien ne fait son bonheur. Elles s'apprêtent à faire le deuxième étage lorsque le téléphone de Kay les interrompt. Mara patiente tranquillement tandis que Kay répond. Celle-ci se retourne et jubile de son sourire malicieux. « Un scoop, Mara, un scoop. Il faut à tout prix que j'y aille. Désolée d'écourter ton calvaire, ça commençait seulement à devenir intéressant. Ciao bella, dit-elle en déposant un baiser sur la joue de son amie. » Toute autre personne se sentirait peut-être offusqué ou juste comme un con d'être planté là mais pas Mara. Kay, elle la connaît par cœur. Elles se plantent mutuellement, Kay pour des scoops venant de la police de la mode et Mara pour les enquêtes. Ça fait partie du jeu. Mara décide de ne pas rentrer maintenant. Vu qu'elle est là, autant faire les boutiques ou au moins semblant de regarder. Le tour fashion se finit bien vite. Une fois tout en bas, Mara est prise d'une envie de manger. C'est comme faire du shopping, non ? Et puis un petit thé avec un carrot cake, ça ne se refuse pas. C'est une récompense pour avoir tenu si longtemps dans un centre commercial. Mara doit bien avouer qu'avoir fait toutes ces boutiques, ça lui a broyé les jambes. Elle n'a même pas la fois de prendre les escaliers. Elle se dirige d'un pas presque mécanique vers l'ascenseur. La machine monte tranquillement, il y a d'autres personnes à bord mais la plupart descendent. Il ne reste que Mara et un homme aux mains prises. La situation est d'une banalité déconcertante lorsque l'appareil se stoppe soudainement. Pas de lumière, rien. Mara sent son cœur palpiter à cause du côté inattendu de la chose. Elle se calme, reprend ses esprits. L'homme dont elle n'a pas retenu le visage semble appuyer sur le bouton d'alarme mais rien n'y fait. « Pour l'instant oui et vous ? » répond Mara à la question de l'homme. Il fait étrangement chaud dans cet ascenseur. « Non mais j'aurai bien voulu. Vous ne trouvez pas qu'il fait chaud ? » Mara commence par enlever son manteau, histoire d'être un peu plus à l'aise.